Belle-Île-en-Mer,appelée plus courammentBelle-Île, est uneîlefrançaiserocheuse située dans legolfede Gascogne(océanAtlantique), au sud de laBretagnedansle département duMorbihan,à 12,3kmau sud deQuiberon,et à la mêmelatitudequeLeCroisicà 50km. Cest la troisième plusgrandeîledescôtes de la France métropolitaine après laCorseetOléron,et la quatrième aprèsJerseysilon prend en compte lesÎlesAnglo-Normandes. Elle reste la deuxième plus grande îlemétropolitaine non reliée au continent par un pont.
Elleest composée de quatrecommunes(Bangor,LePalais,LocmariaetSauzon)qui formaient lecantonde Belle-Île,rattaché depuis 2015 àceluide Quiberon.
Leshabitants de lîlesenomment lesBelliloisetlesBelliloises.
Toponymie[modifier|modifierle code]
C'estdans les écrits du géographePtoléméequapparaîtpour la première fois le nom deVindilispourdésigner Belle-Île3.Engaulois,vindo4veutdire «blanc», ou métaphoriquement «beau,brillant», etillissignifie«île». Comme lîle napparaît pas comme blanche avecses falaises deschistenoir,le sens deVindilisestdonc déjà celui de «belle île»5.
Plinel'Anciendésignait,quant à lui, l'ensemble des îles deGroix,Belle-Île,HouatetHoëdicsousle nom d'InsulaeVeneticae,cest-à-dire îles desVénètes,peuple celte de navigateurs qui a également laissé son nom à laville deVannes6.
Envieuxbreton,Belle-Île est nomméeGuedel,GuadelouparfoisGwedelàpartir duxiesiècle(1029, Charte d'AlainCanhiart,comtede Cornouaille).Les désignations sous les formes grecques dekalosnésos(c'est-à-dire«belle île») oulatinesCalonessusapparaissentsur quelques cartes ou descriptions à partir duxviesiècle7.
Àla fin duMoyenÂge,le nom de Belle-Isle est désormais utilisé en français. Avec laconstruction auxviesiècledu fort de Palais, elle va être désignée enbretoncommeEnezar Kêr veur,«île du grand fort», plus simplementArGerveur8.
Temporairement,sous laRévolutionfrançaise,l'île fut appelée «île de lUnité», mais ce nomne fut jamais confirmé par décret9.Quinze ans plus tard, sousNapoléonIer,la municipalité proposa la nouvelle dénomination de Belle-IsleJoséphine mais le divorce de Napoléon oblige, cette appellation nefut jamais acceptée. L'île gardera alors ses noms deBelle-Île-en-Mer en français, l'extension «en Mer»apparaissant sur les cartes du débutxviiiesiècle,et d'Enezar Gerveurenbreton.
Aunom de Belle-Île, on ajoute parfois«la bien nommée»,formule trouvée par la poétesse belliloiseÉvaJouan,dans son recueil de poèmesDela grève,paru en189610.
Histoire
Préhistoire
Latrace de la présence de l'homme auPaléolithiquemoyenaété révélée par la découverte d'unbifacemousterienàKergoyet en 199130.
Àcette époque, Belle-Île nétait pas encore une île31:elle sest définitivement séparée du continent vers7000av.J.-C., lors de latransgressionflandrienne.
Lapermanence de son occupation est attestée dès leMésolithiqueparde nombreuses découvertes de mobilier, outils, armes et bijouxconservés aumuséearchéologique de la Société polymathique du Morbihan,àVannesetau Musée de Préhistoire de Carnac32.Des sites d'habitat du Néolithique ont été mis au jour àKerdonis, auSkeul,Kerzo et Deuborh.
DanslestourbièresdeSter Vraz (Sauzon),uncrânehumaindatantduNéolithiqueestdécouvert au début duxixesièclepar le botanisteÉmileGadeceau33:il est conservé aumuséeDobréeàNantes. Dessilexdoriginedistale suggèrent lexistence dun commerce maritime entre lîle etle continent vers2600av. J.-C.34.
Mégalithes,tumulus et tombelles
Surla série demenhirsquiformaient un alignement unique traversant l'île dans sa largeur etdont la présence est attestée en 170135,seuls trois sont encore visibles (Menhirs de Kervarigeon,Jean,ci-contre,et Jeanne de Kerlédan): les autresmégalithesontété détruits, certains découpés enpierresde taillepourle bâtiment. En 1989, MM. O. Kayser et Batt, archéologues de laDRAC de Bretagne, ont mis au jour un quatrième menhir, isolé,marquant une tête de vallon au port de Borderun30.
Desnombreuxtumulusquel'on pouvait voir sur l'île jusqu'au milieu duxixesiècle,il ne reste que le tumulus de Borderune: ceux de Kerdavid,Borvran, Kervarigeon sont très arasés. Celui de Runello, au centrede lîle, un des plus imposants de la région, a été rasé vers1830 pour en récupérer les pierres30.
Àl'âgedu bronze,le nombre de sépultures (tumulus de Bordelane, Lanno) traduit uneaugmentation de la population; c'est sans doute laconséquence du développement de lanavigationàcette période. Durant l'âgedu fer,sur la Côte Sauvage, plusieurséperonsbarrés,déjà occupés au Néolithique, sont fortifiés. Le plus important(cinq hectares), nommé localement «camp de César», setrouve sur la presquîle du Vieux Château, dans le Nord-Ouest del'île. Plusieurs dépôts defondeursontété mis au jour, dont un des plus importants d'Europe, conservéaumuséede préhistoire à Carnac32.
Unensemble de tombelles, visible dans les landes de Bordelane, estestimé30dela période de lacivilisationdes champs d'urnes(bronzefinal,début âge du fer soit vers lexesiècleav.J.-C.).
Antiquité
Àl'époquecelte,elle est la plus grande et la plus au large des 365 îles (dit lalégende) de l'archipelduMorbihan(«petitemer») où prospère le peuple navigateur desVénètes.Les traces encore visibles d'éperons barrés (oppida) ayant servide camps aux armées vénètes démontre l'intérêt stratégiqueque Belle-Île pouvait alors représenter.
Ony a découvert des monnaies (statères Vénètes) et des tuilesdatant de l'époquegallo-romaine.À la chute de l'Empireromaincommence,comme en Bretagne, la colonisation par lesbretonsvenus d'Outre-Manche.
LItinérairedAntoninnommeVendilisBelle-ÎleetSiataHouat36.
Lacolonisation monastique
Aucentre de lîle, à l'emplacement de lactuelle commune deBangor,il existe de toute ancienneté unprieuréquitient son nom de l'abbaye qui la fondé à partir duviiesiècle;on ne sait pas sil sagit de labbayede BangorenIrlandedoùlon sait que des moines commesaintColombansontvenus évangéliser lArmorique,ou dumonastèrede Bangor-Fawr,fondé auPaysde Gallesvers545 sur le détroit deMenai.Auixesiècle,Belle-Île appartient auxcomtesde Cornouaille(enArmorique). L'île est dévastée par lesVikingsquipillèrent labbaye et chassèrent une grande partie de ses habitants(vers lexesiècle,des habitants deVendilis(nomque portait alors Belle-Île), chassés de leur île par des piratesnormands, se seraient réfugiés àGuidel,sur des terres appartenant au comte de Cornouaille, leur seigneur37),ce qui oblige le comte de Cornouaille à la confierauxBénédictinsdeRedon:ils y rétablissent le prieuré au même lieu que leur prédécesseurs(à lemplacement actuel du camping municipal de Bangor). Les moinesmettent en œuvre un programme rationnel de colonisation et de miseen valeur: l'île est divisée en quatre paroisses, et leursterritoires allotis en propriétés d'un peu plus de vingt hectaresqui sont attribuées chacune à une famille et dont les contoursresteront stables jusqu'auxviiiesiècle,formant plus de huit villages disséminés.
L'îlechange à nouveau de tutelle en 1029: le comte deCornouailleAlainCanhiartconfiel'île à l'abbayeSainte-Croix de Quimperlé,qu'il vient de fonder. Domaine appartenant à un ordre relevantdupape,Belle-Île se trouvait donc juridiquement ne dépendre ni de l'évêchéde Vannes ni du duché de Bretagne mais directement de la Curieromaine par une sorte d'extra territorialité insulaire. La gestionde l'île est déléguée à un prévôt qui dispose du pouvoirspirituel et temporel (droit de basse, moyenne et haute justice quis'exerce tantôt à Belle-Île tantôt àQuimperlé).En 1408, la justice n'est plus exercée qu'à Quimperlé;deux officiers sont désignés par l'abbé de Quimperlé:l'«official» gère le spirituel et le «commandant»est responsable du temporel de l'île ainsi que de la défense descôtes.
L'îleest constamment la cible, à cette époque, de pirates des régionsvoisines (Saintonge, Charente) ou dennemis de pays plus lointains(Hollande, Angleterre). Les moines qui ont fait construire un premierfort à Palais s'avèrent incapables de repousser ces pillages.Belle-Île est une terre permettant de s'avitailler aisément eneau potable et de piller des vivres, sans prendre le risque dundébarquement sur le continent. Cet intérêt stratégique n'échappepas à Vauban qui, auxviiesiècle,transforme le fort existant en citadelle à Le Palais, plusieursfortifications le long des côtes et uneaiguadeenbordure de mer, aujourdhui nommée laBellefontaine,au lieu-dit de Port Salio. Il s'agit d'un poste d'avitaillementen eau potable, équipé d'un réservoir captant des eaux desource, ainsi que d'un quai d'accostage pour les citernesflottantes chargées du transport de l'eau vers les bateaux aumouillage dans la rade. L'eau y était ensuite pompée pour remplirles pièces à eau, rangées dans les cales des navires38.
Lemarquisat
En1548, le roiHenriIIdécided'entreprendre sa fortification et sa mise en défense en faisantreconstruire le fort de Palais. Comme l'île ne possèdeprincipalement comme pierres naturelles que desschistesfriablesimpropres à lédification de fortifications, des pierresengranitevenantde la démolition duchâteaudAuraysonttransportées par bateau vers lîle et les travaux avancentlentement. Les moines opposent l'insuffisance des richesses del'île pour financer des travaux aussi importants.
Belle-Îleest encore pillée en 1567, cette fois par les Espagnols.
En1573, durant lesGuerresde Religion,l'île est occupée parGabrielde Montgomery,chef militaire protestant. Réfugié enAngleterre,il vient soutenirColigny.La garnison deMontgomeryestchassée par une escadre armée parAlbertde Gondi,ducde Retz.Belle-Île est alors érigée enmarquisaten1573etconcédée par le roi à ce fils de banquier italien, favoriséparCatherinede Médicis,que le roi a fait maréchal de France.
Belle-Îleest désormais le siège d'unesénéchaussée.LesGondicommencentla réédification d'uneforteresseà Palaisetde différents ouvrages de guet sur les côtes. L'île connaît unecertaine tranquillité et une certaine prospérité grâce à cechantier. Mais les finances desGondiquiont de lourdes charges, ne suffisent plus.
Sonpetit-neveu et héritier,Paulde Gondi, cardinal de Retz,frondeurpersécutéparLouisXIVetMazarin,vint se réfugier à Belle Isle au cours de l'été1654aprèsson évasion de la prison deNantes,et une rocambolesque cavalcade qui s'ensuivit. Son cousin le Duc deRetz ayant dimportantes dettes, il dut se résoudre en 1658 àmettre en vente l'île qui trouva preneur auprès dusurintendantdes financesNicolasFouquetalorsen pleine ascension financière pour le prix de un million quatrecent mille livres. Fouquet ne vint jamais à Belle-Île, maiscommença des travaux de fortifications, fit construire une petitejetée et un entrepôt. Le Palais devient pour quelques années unport de commerce avec une dizaine de navires partant pourl'EspagneetlesIndes39.
Fouquetest arrêté le5 septembre 1661. Le projet d'extension duport est abandonné, le marquisat est repris par le roi qui vient àNantes et fait mettre l'île en défense parVauban.Celui-ci fit plusieurs voyages à Belle-île, dressa des plans pourreconstruire la citadelle, fortifier la ville et les différentescôtes, et construire lAiguade Vauban. La ville nouvelledeLorientfutchoisie parColbertpourl'implantation de laCompagniefrançaise des Indes orientalesquiprendra un développement important à partir de la Régence.
Auterme d'un procès de plusieurs mois, Fouquet est déclarécoupable depéculat,condamné en1664aubannissement et à la confiscation de ses biens, peine commuée parle Roi en détention à perpétuité jusquà sa mort en1680.La condamnation à la restitution ne porta pas sur les biens propresde sa femme ni sur lhéritage de ses enfants qui conservèrent laseigneurie de lîle où Madeleine Fouquet continuait à séjourner,faisant construire lhôpital Saint-Louis et venir des religieuses deSaint-Vincent-de-Paul. Le petit-fils de Fouquet, leMaréchalde Belle-Isle,bénéficia encore des faveurs du roi qui le fitMaréchalde France.
En1664ToussaintConen de Saint-Lucécritque «les habitants sadonnent entièrement à la pêche,entrautre dessardinesdontils font un grand commerce, les transportent en Espagne et autresroyaumes étrangers»40.Enjuin 1674, pendant laGuerrede Hollande,une flotte desProvinces-Uniesmenéepar lamiralCornelisTromptenteun débarquement pour prendre possession de lîle afin dalléger lapression militaire des français sur le front du nord. Le27juin, il débarque avec 10000hommes et un équipement desiège, mais après deux mois de tentative il décide de repartir41.
«Cejour, samedi24 juin, l'an 1674, parurent 85navires,frégates, corvettes, flûtes et tartanes hollandaises à la rade deBelle-Isle, dont 5000hommes descendirent en ladite Îlele mercredi suivant, firent le pillage quils purent, profanèrentles églises de Locmaria, Bangor et Sauzon, remontèrent leursnavires le samedi suivant; et, pour ce, toutes les paroissesdes côtes de la Bretagne parurent à la garde de la côte, chacuneen son poste. La même année, il y eut quelque danger de révolte,surtout vers Quimper, et, pour ce, le Roi envoya des cavaliers etfantassins tout lhiver en garnison. Hœc in favorem posteritatis.»(Note de la main de missire Pierre Le Tallec, recteur dePlumergat)42.
«Les123 villages de lîle ont été bâtis en entier par les seigneursde Belle-Île et leur appartiennent en propre, ainsi que les terreset héritages qui constituent lîle. Sauf pour les bourgeoismarchands négociants établis dans la ville du Palais etquelques-uns dans les bourgs (Bangor, Locmaria, Sauzon), tous lespaysans sont fermiers et tenanciers de la seigneurie (…). Leshabitants eux-mêmes gardent les côtes. Ils ne paientnitaillenifouage»43.Les paysans subissaient des conditions très dures, imposées par leseigneur de lîle, considérés comme les plus dures de Bretagne;installés sur des exploitations dont rien ne leur appartenait, ilsne devaient laisser aucune terre en friche, ne pouvaient se livrer àla pêche ou au commerce sans autorisation, devaient descorvées«àla volonté du seigneur» et sans salaire, etc.44.
Laplace royale
Vaubanestdépêché à Belle-Île en 1683 pour vérifier l'état desfortifications. AuPalais,il constate que l'emplacement choisi pour la forteresse n'est pasapproprié car il est dominé par plusieurs positions alentour. Ilporte un regard sévère sur les précédents concepteurs etconstructeurs de la citadelle45.Le déménagement de la citadelle sur l'autre rive qu'il proposeest trop cher, et il doit se contenter de déplacer le village etl'église du Haut-Boulogne qui se trouvent à proximité afin decréer unglacisetde renforcer lacitadelleexistante.Mais les principales améliorations demandées par Vauban ne serontpas réalisées: construction d'une enceinte entourant laville dePalais,construction de défenses suffisantes le long de laplagedes Grands Sablesquiconstitue un lieu de débarquement idéal.
En1686, les troupes de la coalition anglo-hollandaise tentent dedébarquer sur la plage des Grands Sables mais sont repoussées. Unstratagème, qui fait croire que l'île est défendue par destroupes nombreuses, dissuade les assaillants de poursuivre leurstentatives de débarquement.
Madeleinede Castille, la veuve de Fouquet, meurt le12 décembre 1716eten 1718, l'île est rachetée par le roi à son petit-fils LouisFouquet, marquis de Belle-Isle (1661-1738), puis rattachéeaudomaineroyal.En 1720, pendant laRégenceduducdOrléans,l'île est confiée à laCompagniedes Indesdontle directeur estJohnLaw:lePalaisetSauzondeviennentdes ports francs. Les malversations qui s'ensuivent conduisent leroi à confier l'île à desfermiersgénérauxjusqu'en1759, puis à compter de cette date à laprovincede Bretagne.
De1726àsa mort en1740,le gouverneur de Belle-Île estArmandde Mormès de Saint-Hilaire,lieutenantgénéral,ancien membre duConseilde la Guerre.
Durantlaguerrede Sept Ans,Belle-Île est essentielle à l'avitaillement en eau potable delaflottefrançaise.
LesAnglais s'emploient donc activement à la contrôler, afin demenacer l'estuaire de la Loire et la ville de Nantes. Labataillenavale des Cardinaux(àl'est deHœdic)leur assure la suprématie dans les eaux locales. En 1761, lesAnglais débarquent dans l'île sur la plage des Grands Sables. Desredoutes sont rapidement construites sur les hauteurs duPalaismaisn'arrivent pas à contenir les attaquants, qui installent leursbatteries de canons sur les hauteurs pour protéger leur approche,selon le scénario qui avait motivé l.
Photo ancienne ventes exceptionnelles Belle Île en mer (56) - la pointe des poulains c1920